3 avril 2025

Ivresse d'oiseau - une recherche sur les origines animales de la musique. (4/7)

Journal de bord de résidence : Antonio et Silvia parlent aux oiseaux dans la Corona Forestal

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Le lendemain, j’ai rendez-vous avec Silvia et Antonio, deux anciens élèves de Rogelio qui leur a enseigné la musique et le silbo au collège de la Mantaneza. Ils ont la vingtaine, souriants, affables. Antonio et Silvia se révèlent très enthousiastes, je découvre que le silbo est pour eux un véritable terrain de jeu, et qu’il leur permet de partager une véritable complicité, que la pratique commune du silbo a peut-être contribuée à forger. Ils ont été champions de silbo en 2017. Cette compétition annuelle évalue la capacité de deux personnes à dialoguer ensemble à distance par le silbo, c’est-à-dire retranscrire mot pour mot ce que l’autre lui siffle devant un juge.

vue sur le Teide depuis la Corona Forestal

Nous nous retrouvons au café de la Mantaneza puis nous commençons l’ascension de la montagne pour atteindre le parc naturel de la corona forestal, une vaste forêt à mi pente du massif du Teide. La voiture peine à gravir le volcan et il est souvent nécessaire de rétrograder en première pour réussir l’ascension. Arrivés à la fin de la route, nous avons une vue magnifique sur le Teide, le troisième plus haut volcan du monde et la plus haute montagne d’Espagne, qui culmine à 3718 mètres. Nous sommes cette fois dans la Corona forestal, une forêt d’altitude qui encercle les sommets de l'ancien volcan, autour de 2000 m d’altitude. La forêt n’est pas la laurisylve originelle mais est issue de plantations anciennes de pins effectuées par les colons espagnols. Elle est tout de même magnifique et abrite de très nombreuses espèces d’oiseaux. Elle est aussi moins fréquentée et plus silencieuse que l’orée d’Anaga.

La Corona Forestal dans la brume

Du fait de l’altitude et de l’humidité ambiante, les feuilles se chargent d’humidité la nuit. Le matin, des gouttes d’eau s’échappent des feuilles humides, et font un bruit caractéristique en heurtant les feuilles qui jonchent le sol. Ce son est très présent dans les enregistrements. 

J’invite Antonio et Silvia à tenter d’échanger avec les oiseaux en essayant de parler comme eux. Ils se prennent au jeu, et les oiseaux, cette fois, répondent ! Dans cet enregistrement, on entend clairement un dialogue entre le silbo et les merles, au point qu’on ne sait plus qui est qui. C’est très émouvant. Il faut dire que l’endroit est magique, on a la sensation de faire corps avec la nature. Nous sommes loin de toute nuisance liée à l’activité humaine. Le lieu est très calme, atemporel.

Dans ce lieu presque idyllique, le soudain passage d’un avion me ramène en 2021… et je ne peux m’empêcher de penser à Muray schaefer, l’inventeur du concept de « paysage sonore », et à son aversion pour les bruits des moteurs. A l’inverse le manifeste futuriste de Russolo « l’art des bruit » revendique la dimension musicale de nos environnements sonores urbains et industriels. Tout est question de dosage et de contexte peut-être. Dans les années 20, la machine se fait encore rare, 40 ans plus tard le son des avions de ligne commence à se généraliser dans le paysage sonore et à être considéré comme une nuisance, en 2021, ils ont continué à se multiplier au point qu’ils sont devenus une vraie plaie pour les amateurs de field recording. Je me remémore alors le roman Ecotopia, une utopie écologique écrite en 1975, dans laquelle des états américains se séparent du reste des Etats-Unis pour mener une politique écologique décrite dans le livre. Le survol du territoire par des avions y est interdit…

Vue depuis la Montana Blanca

L’avion passé, je reviens à la forêt, aux oiseaux et à mes acolytes. Nous persistons un peu à interpeler les oiseaux mais le miracle ne se reproduit pas tout de suite. Peu importe, il s’est déjà produit une fois, c’est déjà au-delà de mes espérances. Je propose alors à Antonio et Silvia de silber entre eux, d’abord en continuant à imiter les oiseaux, puis dans le silbo gomero traditionnel. A nouveau ils se prennent au jeu et font des magnifiques vocalises que j’enregistre dans un ravin très réverbérant.

La réécoute du passage avec Antonio et Silvia dans le jeu d’imitation des oiseaux est surprenante. Je suis totalement incapable de différencier leurs sifflements des chants des oiseaux présents. Nous nous quittons après cette belle expérience. Et il est temps pour moi de passer à la deuxième partie de mon voyage, sur l’ile de la Gomera, vers les racines du silbo gomero.

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Diario de la residencia: Antonio y Silvia hablan con los pájaros en Corona Forestal

Al día siguiente, me reúno con Silvia y Antonio, dos antiguos alumnos de Rogelio, que les enseñó música y silbo en la escuela Mantaneza. Son veinteañeros, sonrientes y afables. Antonio trabajó en Francia en un centro cultural cerca de Clermont Ferrand. Habla francés. Empiezo a captar algunas palabras de español, combinando a veces esta mezcla desordenada con algunas palabras de inglés, y conseguimos tener la impresión de que nos entendemos. Silvia resulta ser muy entusiasta y alegre, y descubro que el silbo es un verdadero terreno de juego para ellos, y que les permite compartir una verdadera complicidad, que la práctica del silbo juntos quizás ha contribuido a forjar. Fueron campeones de silbo en 2017, una competición anual que evalúa la capacidad de dos personas para comunicarse a distancia utilizando el silbo, es decir, para transcribir palabra por palabra lo que el otro silba delante de un juez.

/// Vista del Teide desde Corona Forestal

Nos reunimos en la cafetería Mantaneza y comenzamos a ascender la montaña para llegar al parque natural de Corona Forestal, un inmenso bosque a mitad de camino del macizo del Teide. Al coche le cuesta subir el volcán y a menudo es necesario reducir a primera para realizar el ascenso. Al final de la carretera, tenemos una magnífica vista del Teide, el tercer volcán más alto del mundo y la montaña más alta de España, que se eleva hasta los 3.718 metros. Esta vez nos encontramos en la Corona forestal, un bosque de altura que rodea las cumbres del antiguo volcán, a unos 2.000 m de altitud. El bosque no es la laurisilva original, sino el resultado de antiguas plantaciones de pinos realizadas por colonos españoles. No obstante, es magnífico y alberga numerosas especies de aves. También es menos concurrido y más tranquilo que el borde de Anaga.

/// La Corona Forestal en la niebla

Debido a la altitud y a la humedad ambiental, las hojas adquieren humedad por la noche. Por la mañana, las gotas de agua escapan de las hojas húmedas y emiten un sonido característico al golpear las hojas contra el suelo. Este sonido está muy presente en las grabaciones.

Invito a Antonio y a Silvia a que intenten hablar con los pájaros intentando sonar como ellos. Les siguen el juego, ¡y esta vez los pájaros responden! En esta grabación se oye claramente un diálogo entre el silbo y los mirlos, hasta el punto de que no se sabe cuál es cuál. Es muy conmovedor. Hay que decir que éste es un lugar mágico, donde uno se siente uno con la naturaleza. Estamos lejos de cualquier molestia relacionada con la actividad humana. El lugar es muy tranquilo y atemporal.

En este marco casi idílico, el paso repentino de un avión me retrotrae a 2021... y no puedo evitar pensar en Muray Schaefer, el inventor del concepto de «paisaje sonoro», y su aversión al ruido de los motores. Por otra parte, el manifiesto futurista de Russolo «El arte del ruido» afirma la dimensión musical de nuestros entornos sonoros urbanos e industriales. Todo es cuestión de dosis y contexto, quizás. En los años 20, las máquinas eran todavía poco frecuentes, pero 40 años más tarde el sonido de los aviones de línea empezaba a impregnar el paisaje sonoro y a considerarse una molestia (cf. Murray Schafer). En 2021, han seguido desarrollándose hasta el punto de ser omnipresentes, una verdadera molestia para los aficionados a las grabaciones de campo. Me recuerda a la novela Ecotopía, una utopía ecológica escrita en 1975, en la que algunos estados norteamericanos se separan del resto de Estados Unidos para seguir una política ecológica descrita en el libro. Está prohibido sobrevolar el territorio...

/// vista desde la cima del Teide

Con el avión y los nervios a cuestas, volví al bosque, a los pájaros y a mis compañeros. Insistimos un poco en llamar a los pájaros, pero el milagro no se repitió enseguida. No importa, ya ocurrió una vez, y superó con creces mis expectativas. Entonces les propuse a Antonio y Silvia que silbaran entre ellos, primero siguiendo imitando a los pájaros, y luego en el tradicional silbo gomero. Una vez más se pusieron a tono y produjeron unas vocalizaciones magníficas, que grabé en un barranco muy reverberante.

Volver a escuchar el pasaje con Antonio y Silvia en el juego de imitación de pájaros es asombroso. Soy completamente incapaz de distinguir sus silbidos de los cantos de los pájaros presentes. Nos despedimos después de esta maravillosa experiencia. Y ahora me toca pasar a la segunda parte de mi viaje, en la isla de La Gomera, a las raíces del silbo gomero.